Par Yves d’Avignon
Longtemps j’ai mené une deuxième vie. Celui de diriger un estaminet de quartier. Ç’aurait été à Verdun, ne vous en déplaise. Comme par magie, je me serais réveillé d’un merveilleux songe plausible, celui d’un académicien ayant atteint l’âge d’un gastronome japonais.
Comme dans les plus beaux livres de cuisine. On m’offre le bonheur de « me farcir » les meilleurs plats du menu, comme ceux du restaurant café Komma Rosta ! Rêve terminé : passons à la table !
D’entrée, à la porte, ils sont trois : maman Elena Matsuo à la cuisine, Dave Côté, le torréfacteur qui a plus d’un grain de café à être connu, et la petite Naomi, jeune de six semaines, qui fait des petits ronrons dans cet univers où accueillant se loge à l’angle Melrose-Wellington. Et il y a aussi grand-père Bunna, qui s’agite deux jours par semaine chez Komma. Tout ici vous apporte l’éloquence souriante et vous fera pousser la porte d’entrée !

« Mon père est d’une gentillesse japonaise (comme dirait Dany Laferrière, l’autre Japonais), il a toutes les qualités d’être tenu telle une personne rebelle aux longs cheveux, sans doute serait-il aussi un gentil personnage qui n’a pas tous les revers d’un Japonais de traditions… »
« Celui qui fait régner le besoin de la conformité – un peuple très exigeant, où il ne faut jamais être exclu du moule. Chez Komma, nous avons voulu créer une communauté invitée à découvrir la cuisine japonaise maison, un endroit où il fait bon respirer l’air serein, salé au goût, entendre le piano, voir les jeunes enfants grandir dans un lieu qui nous rassemble. »
Et les couleurs ! « Essentielles de l’histoire racontée par mon père, qui me disait que les Japonais mangent avec leurs yeux et non avec la bouche. Cinq couleurs de base, qui favorisent une alimentation saine et diversifiée : le blanc du riz, le noir des algues, le vert des échalotes, le rouge des légumes marinés et le jaune des légumes.
Et le sourire de Dave, l’ami de cœur d’Éléna… « Mon objectif est de valoriser le travail des producteurs de café exprimé dans la tasse, ajoute Dave. Il y a aussi une dizaine d’origines de grains différents que l’on peut découvrir avec leurs caractéristiques typiques du terroir… qu’il faut moudre pour faire un vrai bon café savoureux, sourit Dave. Jusqu’à la tasse, c’est mon lot et de répondre aux gens au comptoir, tandis qu’Éléna prépare d’une main japonaise tout ce qui se destine à l’assiette.

« Notre mission est de faire goûter aux convives quelques mets de tout ce que représente la cuisine japonaise. On prépare tout ici, ce qui est notable. Nous offrons la cuisine que l’on peut retrouver dans les domiciles familiaux japonais. »
Le menu japonais et le café fraîchement torréfié à Verdun permettent un mariage exceptionnel. « La valeur première de notre entreprise est l’inclusion. Nous tentons, avec ce café, de rassembler une riche diversité d’individus issus de différents milieux et de contextes sociodémographiques, grâce à un menu varié et accessible.
« Traditionnellement, il y a de cinq à sept accompagnements comme les légumes fermentés, d’autres, marinés, et une bonne place au sel et toutes ses variantes comme la sauce soya ou ses sels aromatisés. Il y en a plus d’une centaine de ces sels utilisés selon le contexte.
« Il y a aussi ces onigiris, des triangles de riz fourrés de différentes saveurs et bordés d’une feuille d’algue. Ce mets est souvent comparé au sandwich. On fait aussi place au bouillon de soupe maison appelé dashi: bouillon japonais maison (végan : au Kombu et shiitake), la base de toutes les soupes servies chez-nous, soit la soupe miso et les soupes aux nouilles udon (importées directement du Japon, de curry japonais. Tout est gentiment une question d’équilibre gustatif, où le gaspillage alimentaire est quasi absent, une autre qualité issue des conventions ancestrales du Japon…

Et le mot d’ordre est typiquement issu de cette île lointaine : « vous êtes les bienvenus, nous nous appelons Elena Matsuo, Dave Côté et Naomi, qui a six semaines… »