Volte-face, les super pouvoirs seront utilisés !
(Texte Pierre Lussier)
En pleine crise du logement, la nouvelle a eu l’effet d’une bombe dans l’opinion publique. Véritable gifle pour le conseil d’arrondissement de Verdun, le blocage d’un projet immobilier majeur au 8, Place du Commerce, a démontré qu’on pouvait difficilement réaliser un tel développement sans faire appel aux super pouvoirs que la ministre de l’Habitation, France-Élaine Duranceau a accordés aux municipalités pour éviter l’ouverture d’un registre.

En fait, 26 citoyens de la zone concernée ont signé le registre d’opposition le jeudi 22 mai exigeant un référendum sur le changement de zonage nécessaire au projet. Et il ne fallait que 21 signatures pour bloquer le changement de zonage et par conséquent le projet. La faible densité du secteur constituait un atout évident pour les opposants.
Le Groupe Mach est le principal promoteur du projet qui prévoit la construction de deux tours de 13 étages totalisant 525 logements. Le site actuellement occupé par une clinique médicale qui doit déménager, et de vastes stationnements se trouvent à proximité du REM, et en face du centre commercial Le Campanile.
Après réflexion, le projet va se réaliser
Au lendemain des résultats du registre, la mairesse Marie-Andrée Mauger a publié un message laconique: « L’arrondissement prend acte du résultat de la tenue de registre et analyse quelle suite sera donnée au projet. » La mairesse et les autres membres du conseil d’arrondissement n’ont donné aucune entrevue sur ce dossier dans les jours suivants.
Affirmant avoir beaucoup jongler sur la réponse à ce blocage, la mairesse a opté pour l’utilisation des super pouvoirs que Québec a octroyés aux municipalités, En entrevue téléphonique avec La Presse, la mairesse précisait : « On a un autre chemin qui nous permet d’aller de l’avant, on va faire tout ça rapidement. » La procédure entraîne des délais supplémentaires, mais on peut penser que l’assemblée du conseil d’arrondissement du 3 juin au Centre Elgar sera déterminante à ce chapitre. Rappelons que la mairesse s’est demandé si c’est légitime de contourner un projet qui a été bloqué au registre par 26 personnes expliquant qu’il est aussi légitime de réaliser un projet qui a une portée communautaire contre les îlots de chaleur, sans oublier les logements en pleine pénurie de logements au pays.
Densification oui, mais pas dans ma cour
Des projets comme le 8, Place du Commerce et la Cité de L’Île sont visiblement inspirés du concept américain de TOD en urbanisme, un concept qui vise à créer des milieux de vie plus compacts, où les habitants peuvent facilement accéder aux services, aux commerces et aux emplois à pied ou en transport en commun. L’acronyme TOD signifie Transit-Oriented Development, en traduction libre Développement axé sur le transport en commun. La proximité d’une station du REM n’est pas étrangère à ces grands projets de haute ou moyenne densité. Hélas, les urbanistes se heurtent souvent à une levée de boucliers lorsqu’ils proposent par le biais des politiciens, des projets TOD. À proximité des stations de métro, il y a aussi du potentiel pour des TOD, mais qui appuierait notamment la construction d’une tour de 10 étages sur la rue de l’Église ?
À L’Île-des-Soeurs, la densification du territoire a toujours été un sujet controversé, suscitant des débats orageux où chacun sort sa calculette pour évaluer la population actuelle et la croissance dans les dix ou vingt prochaines années. À l’époque où Marvin Reisler et Arthur Benarroch étaient conseillers municipaux, L’Île comptait 10 693 habitants (1991), et au recensement de 2021, la population a plus que doublé soit 21 568. Si on n’a pas atteint le chiffre de 25 000 habitants maintenant, c’est sans doute pour bientôt ? C’est vrai que les infrastructures doivent suivre et L’Île en a bien besoin.