Paul Claude Demers a lancé récemment son film Le Journal d’un Père,
un long métrage du genre documentaire. D’origine verdunoise,
le cinéaste s’inspire souvent des paysages d’ici
qui sont d’ailleurs très présents dans sa vie intime et dans ses films.
Texte de Pierre Lussier
Photo d’Adil Boukind
Claude Demers vient de compléter une trilogie évoquant successivement son enfance et sa jeunesse à Verdun, suivie de la recherche d’une femme, sa mère, et plus récemment, la place du père, son père biologique, qu’il n’a pas connu.
Et son père adoptif dont le silence témoigne de son effacement à l’image de beaucoup d’hommes. Ce film aborde le drame du père absent, auquel Demers refuse de s’identifier, lui, déchiré par la distance de 6000 km le séparant de sa fille, qui habite Berlin.
Les qualités du noir et blanc
et de la narration
On reconnaît dans le plus récent film de Demers des caractéristiques qu’on retrouve dans plusieurs de ses œuvres : d’abord la narration hors champ, toujours très poétique. Puis le refus de faire appel à des acteurs professionnels, et enfin le noir et blanc intemporel selon le cinéaste qui a présenté sa mère dans la pénombre, et son père dans une atmosphère glauque.
Le réalisateur nous parle de l’influence des films de Bresson qui a fait appel à des acteurs non professionnels dans la plupart de ses films comme Pickpocket, Mouchette et Au hasard Balthazar. La narration, sans dialogue d’acteurs, nous rapproche de la nouvelle vague française des années ‘60 avec notamment Godard et le cinéma-vérité de Jean Rouch.
Rappelons que Claude Demers a aussi réalisé des films comme Les Dames en bleu (les fans de Michel Louvain) et Barbier, un métier d’homme dont l’action se déroule en partie à Verdun (Butch, Salon Montego, etc.).

Retrouver sa fille
Claude Demers repart pour Berlin le 17 juillet, où il prévoit de séjourner deux mois afin de passer du temps en compagnie de sa fille. Celle-ci a huit ans et vit là-bas avec sa maman. Pas facile pour un père de se retrouver dans un environnement dans lequel des communautés turques et kurdes dominent le voisinage, et où l’allemand est la langue officielle que Claude ne comprend pas.
Verdun, moins accessible
en raison des loyers élevés
« Mon cœur est toujours à Verdun », a confié le cinéaste qui a rappelé ses promenades le long des berges qu’il parcourt en pause dominicale. Des idées lui viennent même lorsqu’il s’arrête pour manger au Garage Café, de la rue Hickson. Les scènes extérieures de son plus récent film ont d’ailleurs été tournées à Verdun et dans le parc Jarry pour des raisons pratiques.
Claude Demers déplore la gentrification, car celle-ci entraîne une hausse des loyers que les familles présentes, depuis longtemps dans Verdun, ne peuvent plus assumer. L’arrivée de commerces pour répondre aux besoins de ses résidents plus fortunés, notamment des boutiques spécialisées qui vendent de l’huile d’olive et d’autres produits importés, ainsi que la prolifération de restaurants, ne répond pas toujours aux besoins des familles plus modestes.
Bande-annonce Journal d’un père

Quand verrons-nous les films de Claude Demers ?
La sortie du film Journal d’un père a eu lieu le 14 juin dernier à la Cinémathèque de Montréal et au Cinéma Beaubien. Hélas, malgré quelques bons reportages dans les journaux quotidiens, l’œuvre de Demers ne pouvait rester plus longtemps à l’affiche que deux ou trois semaines au Cinéma Beaubien. Film classé dans la catégorie documentaire, en noir et blanc, avec une distribution d’acteurs inconnus du public, Le Journal d’un père est un long métrage à petit budget qui ne profite pas des grands réseaux de distribution.
Rejointe à l’extérieur du pays, Diya Angeli, responsable de la sélection des films de Ciné-Verdun (Ciné-Quartier et CAUS) de la rue de Verdun, a confirmé qu’elle voulait insérer le long métrage de Claude Demers dans la programmation de l’automne 2024 de Ciné-Verdun. Des infos nous seront transmises à la rentrée.
Claude Demers avait également une bonne nouvelle. En effet, il a reçu un courriel de Marie-Anne Sergerie, des Rencontres internationales du documentaire de Montréal (RIDM), qui lui a parlé de son film D’où je viens, sorti il y a 10 ans (2014). La jeune femme aimerait présenter en projection anniversaire extérieure et gratuite ce long métrage à Verdun. Marie-Anne Sergerie est responsable du développement des publics aux RIDM. À suivre.

Fils et père, au lit.
Père et fils, en noir et blanc.

