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Mercredi, 15 janvier 2025

La guerre en Ukraine, quelques pensées

Une opinion de Marek Zielinski

La Russie a envahi l’Ukraine. Aussitôt, les rumeurs de la 3e Guerre mondiale resurgissent. À la chute du communisme, Francis Fukuyama, un chercheur en sciences po américain,  a annoncé la fin de l’histoire : plus d’ennemi, plus de conflit, plus d’histoire, un monde uni dans l’idéal démocratique. Une équation qui s’est avérée fausse très rapidement, à peine trois décennies plus tard.

Ce prophète a sous-estimé notre capacité de s’inventer des ennemies, à prendre pour de la menace la différence (de race, de sexe, de religion, de culture, peu importe). Je perçois, pour ma part, cette agression comme un assaut du vieux monde, dépassé, désuet, sur celui qui émerge aujourd’hui, lentement, trop lentement.

Les analyses se succèdent, tout comme prévisions, et chacune porte en soi une part de vérité. Oui, l’Ukraine n’est pas un voisin stable; oui, il y a de ratés sur son chemin vers la vraie démocratie; oui, ce pays n’a pas une longue tradition comme un pays autonome, passant d’un joug à l’autre tout au long de son histoire. Pourtant, aucune de ces raisons ne justifie cette agression et ne peut occulter le vrai drame de ce conflit : le drame des humains qui meurent, qui sont déplacés, arrachés à leurs maisons, qui voient leurs vies basculer vers l’exil ou la désolation.

Certains, plus proches de la littérature que de la politique, y voient un conflit shakespearien, une fatalité, un mécanisme qui entraine tous vers la chute. L’ancien premier ministre polonais a qualifié cette guerre de la « revanche d’un insignifiant », d’un enfant du régime totalitaire qui ne peut pas s’extraire de ce cadre étroit. Régnant en despote depuis plus de 22 ans, dans sa tour d’ivoire, et hanté par les images de la gloire passée d’un des plus grands empires jamais créé, le président rêve de le rétablir, ne serait qu’en partie.

Toutes les analyses de cette guerre mènent inévitablement à l’homme derrière cette décision. Ceci peut  s’appliquer d’ailleurs à tous les conflits, actuels ou passés. C’est à se demander s’il y a vraiment de raisons géopolitiques, des mécanismes qui opèrent en dehors de la volonté des hommes. Et si tout se résumait à l’incapacité de communiquer, de se parler, de se percevoir soi-même comme le reflet de l’autre. C’est peut-être une naïveté,  et en tant que telle est elle toujours écartée vite de toute analyse, mais ça peut être la seule vérité, la plus basique, définitive. Le clivage traditionnel entre la gauche et la droite s’applique de moins en moins, n’explique rien et induit un concept qui semble dépassé : les bons d’un côté, les méchants de l’autre. La vérité est au milieu, mais pour la voir, il faut se défaire du poids des croyances et des convictions (j’adore citer ce mot d’esprit, tant il résume bien ma propre philosophie : interrogé au sujet de ses convictions, un vieux sage a répondu ainsi – Les convictions? Je n’en ai pas, j’ai de l’imagination!). La droite n’a pas à donner des leçons à qui que ce soit, la gauche peut-être encore moins (qu’on pense à Staline, Mao, Pol-Pot, Castro et compagnie).

Que pouvons-nous faire? Adoptons le serment des médecins : en premier, ne pas nuire. N’ajoutons pas à la haine dans le monde, à notre niveau de tous les jours. Notre négativité est comme de la pollution, elle s’ajoute à celle des autres pour créer de lourds nuages toxiques.

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