Texte Marek Zielinski
Recherche de Luz Garcia de Zielinski
« Longtemps, je me suis couché de bonne heure. » Eh bien, cher Marcel (Proust), pas moi ! Pour tout dire, j’ai plutôt tendance à étirer la sauce : pour moi, il n’est jamais trop tard pour aller au dodo. Il y a toujours une dernière petite bricole à vérifier, un message à envoyer (qui ne sera lu que plusieurs heures plus tard), quelques pages à lire absolument, histoire de se coucher avec ce texte en tête (pour l’inspiration, chose sérieuse donc). Idéalement, la nécessité du sommeil m’apparaît comme une corvée, attachée à la faiblesse de notre corps – un mal nécessaire, en somme.
Sommeil, le petit frère de la mort
Le 17 mars, nous célébrons la Journée internationale du sommeil. Depuis toujours, le phénomène du sommeil fascine. Quel est donc cet état énigmatique, entre la vie et la mort ? Pour les Grecs, il est gouverné par Hypnos, le frère de Thanatos, le Dieu de la mort, rien de moins – c’est du sérieux. Le sommeil, c’est l’antre de la mort, un voyage initiatique dans une dimension aussi réelle que la nôtre et d’où origine la vraie sagesse. On prêtait une grande importance aux rêves, on le fait encore de nos jours, pour y trouver les clés de nos maux, de nos paradoxes. La psychanalyse en a fait sa pierre angulaire, et son édifice tient toujours. Les rêves, c’est la mise à nu de notre psyché, enfin affranchi des couches successives de la construction sociale. Malheureusement, ces rêves, nous les oublions au réveil, seulement un faible pourcentage survit avec assez de clarté pour servir à une analyse.
Dis-moi comment tu dors…
Paul Kern, un soldat hongrois de la Première Guerre mondiale, n’a pas dormi durant 40 ans (pas par choix, mais à la suite d’une blessure par balle, à la tête). Se couche-jamais ultime est tout de même mort à 59 ans, son exemple n’est donc pas à suivre. La qualité du sommeil, si fragile et instable, préoccupe les spécialistes qui élaborent des théories là-dessus. Personnellement, je ne connais dans mon entourage qu’une seule personne qui peut prétendre à avoir un sommeil régulier et profond, nuit après nuit. Je vous assure, elle rayonne ! Aujourd’hui, on dort de moins en moins, à cause de plusieurs facteurs. Parmi les plus évidents, la lumière artificielle, qui chasse la nuit, l’annule pratiquement. On se couche moins épuisé physiquement, et si jamais il y a de l’épuisement, il est plutôt d’ordre mental, et le mental, nous le savons tous, est comme ce hamster fou qui dévale des kilomètres sur la roue, sans avancer. Essayez donc de le raisonner, ce hamster – bon courage, la petite bête est têtue.
Mais il est tard, je dois me coucher, céder au chantage de mon corps. Ma grande motivation est que sans dormir, je ne peux pas rêver – et rêver m’apporte souvent de bonnes surprises : j’ai pu récemment flatter la bedaine de Mustapha, mon chat décédé, et l’entendre ronronner. J’espère qu’il viendra me voir cette nuit.