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Lundi, 02 décembre 2024

Mon humain de compagnie

Texte Marek Zielinski
Recherche de Luz Garcia de Zielinski

Quand je me frotte à ses jambes, il se sent choisi, élu, exceptionnel, supérieur. Il me cueille tendrement, enfonce son nez dans ma fourrure, murmure des mots que je suis sensé comprendre – moi, le chat ! – et m’installe confortablement à ses côtés, sur le canapé. L’affaire est dans la poche, mon humain sera aux aguets. Au moindre miaulement, il se pliera en deux pour dénicher une nouvelle gâterie, un gadget dernier cri  qui me divertira durant un après-midi, puis finira dans ce triangle de Bermudes qu’est devenu le garage – le grenier – le sous-sol ou tout autre coin perdu du logement. Je lui fais croire que j’ai besoin de lui – ce qui est vrai, occasionnellement : pour ouvrir une boite ou pour nettoyer ma litière – mais c’est tout le contraire. J’ai rarement vu un esclave si heureux de son statut !

Ma gamelle, mes escapades et ce maudit spot rouge !

S’il tombe si facilement dans mon filet, c’est parce que je lui offre tant, pratiquement sans effort de ma part. Je suis mignon, oui, mais ça n’explique pas tout. J’accepte ses petits défauts, ses sauts d’humeur, ses manies qui m’amusent en fin de compte ; je suis émotionnellement stable, aussi longtemps que ma panse est pleine et qu’on me laisse faire mes siestes de 16 heures chaque jour. Il a toujours quelqu’un à qui parler, même si je ne pipe mot de son charabia ! Je le fais rire quand j’essaie d’attraper ce maudit spot rouge qui sort d’on ne sait où et qui est insaisissable (il parait qu’un camarade l’a déjà pogné, mais ça reste à vérifier). Parfois, quand il laisse la porte ouverte, je pars explorer le voisinage et j’oublie de rentrer. À mon retour, c’est une explosion de joie, il me couvre de caresses et ma gamelle déborde de gâteries. Il est sentimental, il s’attache. Je suis pour lui ce que la gamelle est pour moi, pour dire ça avec un peu de poésie.

Ce n’est qu’un au revoir

Quand je suis parti – pour de bon cette fois-ci, avec des piqûres, de la musique douce et tout le bazar – j’ai vu de la tristesse dans ses yeux. Pourtant, des vies, j’en ai neuf, et je n’en suis pas à ma dernière, je tiens les comptes. Mais mon pauvre humain de compagnie n’en sait rien, il pense que c’est définitif, qu’on ne se verra plus jamais. Avec qui va-t-il jaser maintenant ; pour qui se lèvera-t-il à 5 heures du matin pour une dose fraîche de mes croquettes que je réclame à gros miaulements ; quelle panse flattera-t-il ; dans quel cou plongera-t-il son nez pour humer cette odeur si chaude, si réconfortante ? En fin de compte, il n’est pas si mal mon humain de compagnie. Le problème est que je ne vis pas aussi vieux que lui, il a dû en baver souvent déjà. Mais il recommence, il accepte le risque en sachant qu’un gros chagrin l’attend au bout du chemin. C’est peut-être ça, l’amour ! Allez, je saute sur ses genoux, il sera fou de joie, et moi aussi, j’aime ça.

Ce texte est une ode d’amour à mes deux anges poilus – Aisha et Mustapha –  qui ont éclairé ma vie comme des étoiles filantes et qui sont partis trop tôt.

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