Billet Jean-Guy Marceau
Création Lou Drouin
Samedi matin. En entrant dans la bouche du métro Verdun, juste avant d’emprunter le long escalier roulant, Johanne réalise qu’elle n’a plus ses clés. Angoisse, sentiment connu, du déjà-vu. Elle ressort sur la rue De Verdun comme un chiot fou et décide de refaire son chemin à l’envers. Direction Ouest, tout en fouillant dans son sac à dos pour une quatrième fois. Les poches de son imper sont aussi vides que sa bouteille d’eau. Elle marche et marche encore. Le soleil joue à cache-cache avec les nuages, cela lui donne l’énergie nécessaire pour rester positive et confiante.
Au croisement de la rue Woodland, elle s’arrête spontanément au St-Lo, un bon café ne fera pas de tort, il est 11 heures et le petit bistro d’Isa-Lora est presque plein. Elle s’installe calmement, dépose son sac à dos et découvre que ses clés sont coincées dans la courroie. Elle salue sa chance et bénit ce jour splendide qui lui fait cadeau de cette trouvaille. Même je n’ai pas eu le temps d’implorer St-Jude. Le temps passe, une heure peut-être. Jojo quitte les lieux et abandonne l’idée d’aller au cinéma. Il fait trop beau et, en plus, sa cousine Danielle qui habite dans le quartier près de l’école Notre-Dame-de-la-Garde, l’invite à casser la croûte entre « cousamies » comme elles s’appellent. Plus amies que cousines, elles ont toutes les deux des tempéraments compatibles. L’une est prof, l’autre à la retraite. Avant de sonner, Johanne regarde son reflet dans la vitre de la porte. Elle constate qu’elle sourit. Ding dong… Elles sont les filles aînées de deux sœurs. Elles ont les mêmes goûts, trippent sur Louis-Jean Cormier, les chats et les sushis.
Dès son arrivée, elles s’installent à l’extérieur sur le patio pour le lunch. Le chat de Danielle, Fusain, joue avec une araignée dégelée et imprudente sous la table. Un verre de sangria souligne l’événement. Elles parlent de tout et de rien et se régalent du petit buffet improvisé. Pendant ce temps, Johanne ne se rend pas compte que ses clés (eh oui !) glissent sans bruit dans la haie qui entoure le patio. Elles jasent, elles jasent… 18 h 30. Le soleil commence à faire ses adieux et refroidit le temps. Johanne quitte et se rend chez elle, deux coins de rue. Elle cherche encore ses maudites clés.
– C’est vraiment trop, songe-t-elle.
Certaine qu’elles sont chez sa cousine, pas de panique, elle appelle et en deux minutes récupère l’objet de son tourment. Aller-retour rapide, elle rentre chez elle un peu étourdie (sangria), fatiguée et surtout ravie du dénouement.
… ça, elle en est certaine. Elle s’endormit tôt devant le téléviseur, son trousseau de clés dans les mains. On est jamais trop prudents !