La Maison L’Étincelle accueille un jeune bénévole Mauritanien,
demandeur d’asile politique, car victime de représailles
en raison de son affiliation politique dans son pays.
Il vient chercher la Paix chez nous, au Canada… Voici Mohamed.
Nous avons la chance de vivre dans un pays où les valeurs de démocratie et de liberté sont acquises et immuables. Malheureusement, certains peuples dans d’autres contrées du monde ne peuvent pas en dire autant.
Texte d’Ahmed Chetioui
C’est l’histoire de Mohamed, un jeune Mauritanien qui a fui la dictature de son pays pour trouver refuge au Québec, plus précisément à Verdun. La ressource Notre-Dame-de-la-Paix l’a accueilli en tant que bénévole, lui permettant ainsi de perfectionner son français et d’acquérir de l’expérience dans un lieu de travail.
Avant d’arriver au Canada, Mohamed était un jeune Mauritanien plein d’espoir, attaché à son pays et à ses parents dont il avait la charge. Après des études en économie, il obtient sa licence et trouve un emploi dans une agence bancaire. Pour lui, vivre heureux et libre dans son pays était une chose normale. Malheureusement, ses prédictions se sont révélées erronées. Son tort a été de s’affilier à un parti politique d’opposition, pensant que la transition politique se ferait démocratiquement par les urnes.
Très vite, des représailles ont été prises contre lui et d’autres intellectuels. Il perd son emploi, se retrouve au chômage sans ressource, et avec une famille à charge. Avec d’autres compatriotes, il ne voit qu’une solution à son problème : fuir vers d’autres horizons plus cléments.
Source Larousse
Le périple de Mohamed commence le 28 septembre 2023 par Istanbul, qui a été un aéroport de transit vers la Colombie, puis le Salvador et enfin le Nicaragua, où il obtient un visa de visiteur contre le paiement d’une taxe de 120 $ US. Un passeur à l’extérieur de l’aéroport le prend en charge avec d’autres réfugiés africains et les emmène dans un hôtel sordide où ils doivent attendre minuit. À cette heure-là, le passeur accompagné d’hommes armés vient les chercher pour les faire traverser la frontière. Sur le chemin, Mohamed remarque le corps d’un homme mort sur le bas-côté de la route, prenant conscience du danger qui l’attend tout au long de son périple.
Arrivé à la frontière du Honduras vers 6 h du matin, le groupe se cache dans une forêt pour échapper aux gardes-frontières et attend le passeur qui doit les faire quitter le Honduras. C’est une femme chef d’un groupe armé qui les accompagne, les faisant monter dans un camion et les cachant sous des bottes de foin. Le voyage dure deux jours, traversant des montagnes et des gorges dangereuses, jusqu’à la frontière du Guatemala. Il reste 11 jours dans ce pays, caché dans un hôtel miteux sous la menace d’un groupe armé. À l’aube du douzième jour, les passeurs les font monter dans un camion servant au transport du bétail, cachés sous des bottes de foin. Après une journée de route, le camion s’arrête en forêt en pleine nuit et d’autres passeurs les prennent en charge pour continuer à pied leur périple cette fois-ci.
Au Mexique, point de salut
Le passage jusqu’au Canada est très difficile pour Mohamed, pour des raisons évidentes de conditions météorologiques…
… mis à part celles-ci, souffrance, peur et doute ont accompagné Mohamed durant sa traversée : aucun mot ne sera assez fort, sauf le courage qui l’a poussé à finir son périple.
Ils marchent toute la nuit et au petit matin, arrivent au bord du fleuve séparant la frontière guatémaltèque de la Mexicaine. Les passeurs leur demandent de rester cachés dans le sous-bois au bord du fleuve jusqu’à la tombée de la nuit pour éviter les patrouilles. À la nuit tombée, le groupe embarque dans des canots à moteur et traverse le fleuve. Les réfugiés sont couchés au fond des canots pour éviter d’être vus par d’éventuels gardes côtiers.
Les canots accostent à l’aube du côté mexicain, où d’autres passeurs les attendent avec des camions pour les emmener jusqu’à Mexico City par des routes de montagne, évitant ainsi les patrouilles ou de l’armée mexicaine. À Mexico City, ils sont hébergés dans un hôtel en périphérie de la ville, et un avocat leur remet de faux dossiers judiciaires et de faux documents de voyage pour qu’ils puissent se rendre à Tijuana par avion. De là, un passeur leur propose de traverser la frontière soit en escaladant le mur entre le Mexique et les États-Unis en leur procurant une échelle, soit en traversant un marais d’eaux usées. Mohamed choisit la deuxième solution avec d’autres compagnons d’infortune. La police mexicaine a bien essayé de les arrêter, mais ils ont été plus rapides.
Après avoir traversé le marais, le groupe de Mohamed arrive aux États-Unis où il est arrêté par la police des frontières. Mohamed est emprisonné pendant 7 jours à San Diego, puis relâché avec un dossier judiciaire et une promesse de comparaître. Voulant se rapprocher des frontières canadiennes, il prend un vol pour le Michigan, où il vit de petits boulots durant deux mois avec l’aide de la communauté musulmane. Ne pouvant rester aux États-Unis, il prend un vol pour New York, puis arrive à Plattsburgh où un passeur lui demande une somme importante pour le faire passer du côté canadien. Faute de moyen, il décide avec un ami de faire la traversée en plein hiver par -15 degrés. Le passage jusqu’au Canada est très difficile en raison des conditions météorologiques. Ses mains enflent à cause du froid et il est sur le point de développer des engelures. Ils sont finalement recueillis avec son ami par les douanes canadiennes, à qui il déclare son statut de réfugié.
Au Canada, en confiance !
Il faut apprécier les efforts
que ce Mauritanien s’est offert
pour rendre sa vie plus heureuse….
Et surtout la vie des autres.
Ce récit ne décrit pas vraiment la souffrance, la peur, le doute, qui ont accompagné Mohamed durant sa traversée, car aucun mot ne sera assez fort, mais reste le courage qui l’a poussé à finir son périple.
Durant la même année, 30 000 Mauritaniens ont fui leur pays, dont plusieurs intellectuels. À quel moment les gouvernements de ces pays vont-ils se réveiller et offrir à leur peuple un avenir ? À quel moment ces gouvernements vont-ils comprendre que la vraie richesse d’un pays, c’est son peuple et sa jeunesse, et non la richesse de son sous-sol qui profite seulement à une minorité ?