Tout le monde est pour la vertu. Mais tout le monde n’est pas nécessairement d’accord pour accueillir, à quelques semaines d’avis, des itinérants dont le mode de vie est aux antipodes. Surtout dans un quartier résidentiel où les gens partagent leurs habitudes de vie et profitent d’un environnement paisible.
Texte de Pierre Lussier
Jeudi soir dernier, près de 200 personnes ont envahi la salle du conseil en réponse à la nouvelle de l’implantation d’un service d’hébergement d’urgence temporaire de personnes itinérantes aux Jardins Gordon. La Ville de Montréal a acheté cette ancienne résidence en 2023, promettant d’y aménager possiblement 80 logements abordables réalisés par la Société d’habitation et de développement de Montréal (SHDM), et dont les travaux doivent débuter à l’été 2024.
Actuellement inoccupé, l’immeuble s’est vite retrouvé dans la mire du Centre intégré universitaire de santé et de services sociaux (CIUSSS) du Centre-Sud de l’Île de Montréal, et des responsables municipaux du dossier de l’itinérance, en raison de la fermeture du refuge au Complexe Guy-Favreau. Notez que des fonds (plus de 9 M$) ont été alloués récemment par le ministre responsable des Services sociaux Lionel Carmant, pour les refuges et centres d’hébergement destinés aux itinérants.
On sait qu’il manque des places d’hébergement et que la fermeture de Guy-Favreau ne facilite pas les choses avec l’arrivée de l’hiver et des grands froids. On ne peut pas laisser des gens mourir de froid faute de refuge où dormir et manger, selon la mairesse Plante.
Les gestionnaires au rendez-vous
Le panel de présentation était particulièrement important jeudi soir puisqu’il réunissait Josefina Blanco, membre du comité exécutif de la Ville de Montréal, responsable du dossier de l’itinérance, Serge Lareau, commissaire aux personnes en situation d’itinérance de la Ville, Maxime Beaulieu, nouveau commandant du poste de quartier 16 (PDQ), et Martin Raymond, directeur général adjoint de la Société de développement social de Montréal.
Fait à noter, c’est Martin Raymond et son équipe qui doivent gérer les activités du Centre jusqu’à la fermeture en juin 2024.
Un Centre 24/7, c’est quoi ?
C’est un refuge accessible 24 heures par jour, sept jours par semaine, un lieu où il n’y a pas de file d’attente à la porte, a expliqué Martin Raymond. On offre un toit et des repas aux bénéficiaires pour qui l’accueil est le plus inclusif possible, même avec leur compagnon canin ou félin.
Le Centre de la rue Gordon peut accueillir 50 personnes en situation d’itinérance, des gens qui sont évalués à leur arrivée au 1050, rue Gordon. Parmi ces itinérants, il y a des toxicomanes et des alcooliques, dont on examinera la condition à l’entrée. Le Centre en résumé assure l’hébergement, les repas, l’accompagnement et un milieu de vie pour ces personnes sans adresse fixe et souvent solitaires.
Commandant du PDQ 16, Maxime Beaulieu a insisté sur la préparation de son équipe à l’arrivée de ce centre en insistant sur la présence de deux policières, des agents socio-communautaires assurant un suivi sans compter d’autres policiers patrouilleurs familiers avec ce type de problématique.
Méfiance et questionnement du voisinage
Des parents d’écoliers ont dit craindre la présence d’itinérants à proximité des écoles primaires et dans les parcs du voisinage. En marge de quelques reportages plutôt alarmistes des médias, des résidents voient déjà des seringues et autres articles peu ragoûtants qu’on ne souhaite pas voir sur les pelouses environnantes.
Apaisement et sens des valeurs
À un moment, jeudi soir, on craignait le pire en entendant quelques personnes répliquer à voix haute dans la salle, aux propos des intervenants. Par bonheur, la mairesse de Verdun Marie-Andrée Mauger s’est exprimée calmement sans jamais élever la voix pour expliquer le contexte où elle-même a été prévenue du projet en octobre.
Mme Mauger a fait preuve d’humanisme en exprimant sa compassion pour ces itinérants et en rappelant qu’il s’agit d’un service temporaire sans oublier les mesures de sécurité appliquées afin de protéger la quiétude du voisinage.
La mairesse a aussi insisté sur la création d’un comité de bon voisinage en suggérant aux gens dans la salle de s’inscrire à ce comité pour assurer un suivi des plaintes et des suggestions au cours des prochains mois.
Bien sûr, des gens ont quitté les lieux avant la fin, marquant ainsi leur désaccord, mais ils étaient peu nombreux et c’est sans chahutage que la salle du conseil s’est vidée après 21h30.
—